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Comme chacun le sait, le barème d’indemnisation du licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, dit barème MACRON, est une des figures les plus emblématiques des ordonnances MACRON de septembre 2017.

Ainsi, en cas de licenciement sans cause réelle ou sérieuse ou abusif, les juges sont désormais contraints de fixer le montant des dommages et intérêts du salarié en fonction d’un plancher et d’un plafond.

Le plafond d’indemnisation est fixé comme suit par l’article L.1235-3 du code du travail :

« Si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.

Si l’une ou l’autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés dans le tableau ci-dessous » Vous pouvez consulter le tableau en cliquant ici.

« En cas de licenciement opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés, les montants minimaux fixés ci-dessous sont applicables, par dérogation à ceux fixés à l’alinéa précédent » Vous pouvez également consulter le tableau en cliquant ici. 

Ainsi, le barème MACRON fixe le montant de l’indemnité minimale et maximale en fonction de l’ancienneté du salarié et de la taille de l’entreprise (plus ou moins de 11 salariés).

Le seul moyen de s’affranchir de ces barèmes était pour le salarié de démontrer qu’il avait été victime de faits de harcèlement moral ou sexuel, ou de dénoncer des faits de discrimination ou encore de mettre en avant le licenciement d’un lanceur d’alerte ou d’un salarié protégé.

La barèmisation des indemnités dues en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse avait donc depuis son apparition, largement contribué à la baisse du nombre de contentieux devant les conseils de prud’hommes.

Pourtant, l’actualité jurisprudentielle récente semble remettre en question le principe de limitation posé par le barème MACRON.

C’est en répondant à la question de savoir si la barèmisation était conforme, ou non, à la convention n°158 de l’OIT (organisation internationale du travail) ou à la Charte sociale européenne, que plusieurs conseils de prud’hommes ont tranché.

Ainsi, dans une décision du 26 septembre 2018, le Conseil de Prud’hommes du MANS a considéré que le barème fixé par les ordonnances de septembre 2017 était bien conforme à la convention n°158 de l’OIT, puisqu’il n’empêchait pas une indemnisation adéquate, et l’application de toute autre forme de réparation considérée comme appropriée.

Il a en effet considéré qu’il appartenait au Juge de prendre en compte tous les éléments déterminant le préjudice subi par le salarié licencié lorsqu’il se prononçait sur le montant de l’indemnité à la charge de l’employeur.

A l’inverse, dans une décision du 13 décembre 2018, le Conseil de Prud’hommes de TROYES a censuré le barème d’indemnités de licenciement en considérant que la Charte sociale européenne du 3 mai 1996, ratifiée par la France le 16 mars 1989, et l’article 10 de la Convention n° 158 de l’OIT sur le licenciement, trouvaient application directe devant les tribunaux français.

Le Conseil en a ainsi déduit que le plafonnement des indemnités prud’homales ne permettait pas aux juges d’apprécier les situations individuelles des salariés injustement licenciés dans leur globalité, et de réparer de manière juste le préjudice qu’ils avaient subi.

De plus, le conseil a souligné le fait que ces barèmes ne permettaient pas d’être dissuasifs pour les employeurs qui souhaitaient licencier sans cause réelle et sérieuse, un salarié. Il a même jugé que ces barèmes sécurisaient d’avantage les fautifs que les victimes et étaient, de fait, inéquitables.

Partant, et afin d’accorder des dommages et intérêts supérieurs aux barèmes de l’article L.1235-3 du code du travail, le Conseil a considéré que ces derniers étaient tout simplement inconventionnels.

Tout récemment, dans un jugement un 19 décembre 2018, le conseil de prud’hommes d’AMIENS, mais aussi le conseil de prud’hommes de LYON dans un jugement du 21 décembre 2018,  se sont également fondés sur la convention n° 158 de l’OIT, afin d’accorder à un salarié dont le licenciement pour faute grave a été requalifié en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, une indemnité dite « adéquate », ou toute « forme de réparation appropriée », excédant le montant maximal fixé par le barème MACRON, en réparation de son préjudice.

Il semblerait que la contestation du barème MACRON soit désormais devenue contagieuse.

Ces décisions ne sont évidemment pas définitives et il faudra sans doute encore attendre de longs mois, avant que les juges de la Cour de cassation ne se prononcent sur le sujet, pour connaitre enfin la position à adopter.

Il est évident que le barème MACRON va encore faire couler beaucoup d’encre.

A suivre …